Premières applications de l’acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution en République Démocratique du Congo : cas des tribunaux de commerce de la ville –province de Kinshasa

Résumé

Depuis l’indépendance, la République Démocratique du Congo avait continué l’application des règles de droit obsolètes totalement inadaptées à l’environnement et aux conditions économiques actuelles.
Le code de procédure civile hérité de la colonisation est demeuré parmi les textes de base de la procédure par laquelle un créancier pouvait obtenir une décision de justice condamnant son débiteur au paiement de sa créance mais aussi recourir aux voies d’exécution. Avec les Actes Uniformes une partie de l’histoire a été modifiée. La justice congolaise doit désormais appliquer les Actes Uniformes. Elle se trouve butée à des procédures nouvelles parfois différentes des procédures jadis appliquées dans les juridictions. L’examen de l’application de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution a été retenu du fait qu’il est le plus sollicité en cas de litige. Plusieurs difficultés d’ordre pratique et procédural ont surgi et l’analyse permet de déceler les failles.

Plan :

I. Introduction
II. Présentation des Tribunaux de Commerce en République Démocratique du Congo
III. Destinataire de la requête dans la procédure d’injonction de payer
IV. Ordonnances rendues en cas de litiges nés du contentieux de l’exécution, Rédaction des actes de procédure et cas des nullités
V. Registre des procédures simplifiées de recouvrement
VI. Application de l’article 12 dans la phase de l’opposition dans la procédure d’injonction de payer
VII. Article 30 de l’AUPSRVE
VIII. Article 111 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions de l’ordre judiciaire
IX. Saisie immobilière
X. Conclusion
I. Introduction

Depuis 2003, la République Démocratique du Congo avait déjà exprimé son souhait d’adhérer au traité OHADA. Plusieurs étapes se sont succédées entre autre l’autorisation du Parlement pour adhérer au Traité (Loi n°10/002 du 11 février 2010 autorisant l’adhésion de la République Démocratique du Congo au Traité du 17 octobre 1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique). En date du 5 février 2010 la Cour Suprême de Justice sous le RConst.112/TSR va à la suite de la requête du Président de la République, rendre l’arrêt suivant: « … au regard de l’article 217 de la Constitution que le Traité soumis à son examen ne comporte pas de clause contraire à la Constitution et que sa ratification n’appelle pas une révision préalable de cette dernière ». Enfin le 13/07/2012 le dépôt des instruments de ratification du traité va intervenir.

L’application du Droit OHADA, est devenue effective dans le système judiciaire de la République Démocratique du Congo depuis le 12 septembre 2012 qui est la date d’entrée en vigueur de ce Droit qui a pour fondement l’intégration du pays dans la mondialisation judiciaire pour l’amélioration du climat des affaires. Il y a lieu de relever que parmi les réformes initiées par le Gouvernement congolais en vue d’assainir l’environnement des affaires, il y a la création des Tribunaux de Commerce.
L’adhésion à l’OHADA fait également partie des efforts entrepris pour l’assainissement du climat des affaires. Cette adhésion présente l’avantage d’avoir rajeuni en un « seul mouvement » le droit des affaires en République Démocratique du Congo. En effet plus de cinquante ans après son indépendance le recours aux textes datant de l’époque coloniale mais aussi ceux des premières années de l’indépendance, avait continué avec l’application des règles de droit obsolètes et parfois totalement inadaptées à l’environnement et aux conditions économiques et commerciales actuelles.

Nous pouvons citer quelques textes notamment :

~ Décret du 2 août 1913 sur les commerçants et la preuve des engagements commerciaux ;
~ Décret du 06 mars 1951 instituant le registre du commerce modifié par le décret du 16 juin 1960 ;
~ Ordonnance n° 79-025 du 07 février 1979 relative à l’ouverture d’un nouveau registre du commerce modifiant et complétant l’ordonnance n°41/161du 15 juin 1951 relative au registre du commerce ;
~ Décret du 19 janvier 1920 relatif aux commissionnaires et aux transporteurs modifié par le Décret du 30 mars 1931 ;
~ Décret du 27 février 1887 sur les sociétés commerciales modifié par les Décrets des 23 mars 1921, 26 août 1938,08 octobre 1942,23 juin 1960 et le Décret-loi du 19 septembre 1965 ;
~ Décret du 27 juillet 1934 relatif aux faillites modifié par les Décrets des 19 décembre 1956 et 26 août 1959 ;

Depuis le mois de septembre 2012, la République Démocratique du Congo est en plein dans l’OHADA et se retrouve confrontée à des problèmes d’ordre pratique liés à l’application des Actes Uniformes . Plusieurs affaires concernant les Actes Uniformes ont été portées devant la justice dont certaines n’ont pas encore connu de jugement. Il y a des affaires ayant trait à l’Acte Uniforme relatif au Droit des Sociétés Commerciales et du Groupement d’Intérêt Economique qui concerne par exemple l’annulation de l’Assemblée Générale Extraordinaire. En rapport avec l’Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général il y a des causes qui concernent les différents problèmes liés au bail professionnel, à la vente ou au RCCM. En ce qui concerne l’Acte Uniforme portant organisation des Sûretés, les litiges concernent entre autre l’hypothèque. En République Démocratique du Congo les commerçants personnes physiques ou morales naissent en se conformant à la loi mais une grande majorité disparait sans suivre la procédure lorsqu’ils connaissent des difficultés financières pour se maintenir sur le marché. La matière concernant les entreprises en difficulté a de tout temps était celle qui est la moins examinée par les juridictions congolaises.

Depuis le 12 septembre 2012 jusqu’au mois de juillet 2013 le Tribunal de Commerce de kinshasa/Matete n’a enrôlé qu’un seul dossier qui est encore en cours. Celui de Kinshasa /Gombe en a enrôlé un peu plus mais aucune procédure dans ces dossiers ne semble évoluer.

Il ressort des différents registres des Tribunaux de Commerce que les conflits en rapport avec l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution(AUPSRVE) sont les plus nombreux. Il sera donc question dans cet article de présenter et d’analyser quelques cas d’application ayant posé problème ou non et même les difficultés à venir du Droit OHADA en République Démocratique du Congo.

Dans le cadre de cet article nous nous sommes limités aux 15 premiers mois de l’application de cet Acte Uniforme par les Tribunaux de Commerce de la ville de KINSHASA.

II. Présentation des Tribunaux de Commerce en République Démocratique du Congo

La République Démocratique du Congo comprend trois ordres de juridictions ayant à la tête la Cour Constitutionnelle, la Cour de Cassation et le Conseil d’Etat. Mais en attendant l’installation effective de ses trois Hautes juridictions, la Cour Suprême de Justice remplit les compétences dévolues à celles-ci. La République Démocratique du Congo comprend une Cour d’Appel par province soit onze provinces actuellement en attendant le découpage territorial tel que prévu dans la constitution. La ville-province de Kinshasa est la seule à avoir deux Cours d’Appel, celle de Kinshasa/Matete et celle de Kinshasa/Gombe. Chaque ressort de Cour d’Appel à Kinshasa est composé de :

Une Cour d’Appel
Deux Tribunaux de Grand Instance
Un Tribunal de Commerce
Un Tribunal de Travail (en cours d’installation)
Quatre Tribunaux de Paix

Les Tribunaux pour enfants (Deux sièges secondaire dans le ressort de Kinshasa/ Matete et dans le ressort de Kinshasa/ Gombe : Un siège principal et deux sièges secondaire)
Le tribunal secondaire de Kinkole dans le ressort de Kinshasa/Matete
Près la Cour d’Appel il existe un Parquet Général. Pour tous les autres Tribunaux, il est prévu deux Parquets de Grande Instance dans chaque ressort de Cour d’Appel. Il existe également un parquet secondaire au niveau de Kinkole.

Les Tribunaux de Commerce ont été créés par la loi n° 002/2001 du 03 juillet 2001 portant création, organisation et fonctionnement des Tribunaux de Commerce. Le Tribunal de Commerce de Kinshasa /Gombe a été installé en 2006 et celui de Kinshasa/Matete en 2007.

Le Tribunal de Commerce n’est pas une juridiction d’appel. Elle ne siège qu’au premier degré. L’article 2 de la loi portant création, organisation et fonctionnement des Tribunaux de Commerce dispose : « Le Tribunal de Commerce est une juridiction de droit commun siégeant au premier degré et composée de juges permanents qui sont des magistrats de carrière et de juges consulaires…. ». A la suite de cette disposition, cette juridiction est composée d’une part de juges permanent qui sont des magistrats de carrière et d’autre part des juges consulaires qui sont issus du monde des affaires après un processus d’élection.

La compétence est fixée par l’article 17 de la loi précitée :

« Le Tribunal de Commerce connaît en matière de droit privé:

1. des contestations relatives aux engagements et transactions entre commerçants ;
2. des contestations entre associés, pour raisons de société de commerce;
3. des contestations entre toutes personnes relatives aux actes de commerce, en ce compris les actes relatifs aux sociétés commerciales, aux fonds de commerce, à la concurrence commerciale et aux opérations de bourse ;
4. des actes mixtes si le défendeur est commerçant;
5. des litiges complexes comprenant plusieurs défendeurs dont l’un est soit caution, soit signataire d’un chèque bancaire, d’une lettre de change ou d’un billet à ordre ;
6. des litiges relatifs au contrat de société ;
7. des faillites et concordats judiciaires.

Il connaît, en matière de droit pénal, des infractions à la législation économique et commerciale, quel que soit le taux de la peine ou la hauteur de l’amende. »
La République Démocratique du Congo compte six Tribunaux de Commerce déjà opérationnel à savoir celui de Kinshasa/Gombe et Kinshasa/Matete dans la ville province de Kinshasa, le Tribunal de Commerce de Lubumbashi, Goma, Matadi, Kisangani et MbujiMayi dans différentes provinces du pays. D’autres Tribunaux sont en cours d’installation.

III. Destinataire de la requête dans la procédure d’injonction de payer

Les procédures simplifiées de recouvrement de créances s’entendent comme étant des voies par lesquelles un créancier peut rapidement obtenir un titre exécutoire c’est-à-dire une décision judiciaire de condamnation de son débiteur au paiement de la créance .

L’article 3 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement de créances et des voies d’exécution (AUPSRVE) dispose que la demande est formée par requête auprès de la juridiction compétente du domicile ou du lieu où demeure effectivement le débiteur.

L’article 4 du même Acte dispose que la requête doit être déposée ou adressée par le demandeur ou par son mandataire autorisé par la loi de chaque Etat partie à le représenter en justice, au greffe de la juridiction compétente…
Les termes utilisés par cet article ont amenés à des interprétations différentes dans la ville de Kinshasa. C’est ainsi qu’au départ dans certaines juridictions la requête avait été adressée au président de la juridiction et dans une autre au Greffier Divisionnaire.
A la base de cette application différente nous avons une interprétation strictement attachée aux prescrits de l’article 4 précité. Cette mauvaise application a connu des débats au sein des juridictions congolaises où deux tendances se sont dessinées de la manière suivante :

Pour la première, la requête dont le destinataire est le greffe au regard de l’article 4 susdit doit être adressée à la personne responsable des greffes au sein des juridictions. En République Démocratique du Congo, pour les Tribunaux de Commerce ou de Grande Instance il s’agit du greffier divisionnaire.
Pour la seconde, l’autorité devant prendre la décision est le président de la juridiction donc la requête doit lui être adressée et pour cela ils font une combinaison des articles 3 et 4 dudit Acte Uniforme.

Situation assez confuse où l’on s’est retrouvé dans certains tribunaux dans les premiers mois d’application avec une requête adressée au Greffier Divisionnaire qui ne reçoit pas la réponse de celui-ci mais plutôt une ordonnance du chef de juridiction. La question que l’on peut se poser est celle de savoir par quel mécanisme une requête adressée au Greffier Divisionnaire arrive au chef de juridiction et le conduit à rendre une ordonnance en réponse à cette requête.

En principe les requêtes bien que réceptionnées au greffe du tribunal sont adressées au Président de la juridiction pour ce qui concerne l’injonction de payer. L’article 4 précité dont la rédaction est malencontreuse a fait penser à une tendance que le greffier responsable du greffe d’une juridiction en était le destinataire. Le greffe n’est pas une juridiction mais un service au sein d’une juridiction qui s’occupe entre autres de la rédaction et tenue des actes de la juridiction du président et du tribunal. Le vocabulaire juridique le définit comme « un office ministériel, placé sous l’autorité et la responsabilité d’un greffier titulaire de charge, assurant l’ensemble des services administratifs des tribunaux de commerce… »5.

Or la demande est formée par requête auprès de la juridiction compétente (article 3). Le chef de la juridiction est le président, ce dernier est le seul qui examine la requête, en vérifie la recevabilité et se prononce quant au fond.
La solution à cette situation serait au regard de la formulation peu heureuse de l’article 4 que celui-ci soit modifié. La nouvelle rédaction devra préciser clairement que la requête devra être adressée par le demandeur, ou par son mandataire autorisé par la loi de chaque État partie à le représenter en justice, au président de la juridiction compétente. Celle-ci est déposée au greffe de la juridiction compétente.
Avec le temps la question a été réglée et à la date de ce jour toutes les requêtes sont adressées au président de la juridiction.

IV. Ordonnances rendues en cas de litiges nés du contentieux de l’exécution, Rédaction des actes de procédure et cas des nullités

La rédaction des exploits a également posé quelques problèmes lors des premières applications. En effet la lecture de l’Acte Uniforme portant procédures simplifiées de recouvrement et les voies d’exécution révèle que cette dernière matière est attachée à un formalisme rigoureux et même excessif comprenant des exigences d’ordre procédurale assez stricte en ce qui concerne les mentions que doivent contenir les exploits à peine de nullité.

Bien qu’il existe dans cet Acte Uniforme plusieurs autres types de sanctions nous allons nous limiter à la nullité. Cela n’exclut pas les cas d’irrecevabilité par exemple en violation des prescrits de l’article 4 de l’AUPSRVE, de caducité et autres sanctions.
Il sied de relever que les cas de nullité sont nombreux et c’est ainsi que la majorité des décisions rendues ont relevé la nullité des actes de procédures.

La nullité s’entend comme la sanction encourue par un acte juridique entaché d’un vice de forme ou d’une irrégularité de fond qui consiste dans l’anéantissement de l’acte . Il peut s’agir de la situation où l’on a affaire à une sanction qui intervient à la suite d’une irrégularité dans la rédaction d’un exploit et même d’une irrégularité au moment de la signification d’un exploit.
L’on constate après lecture de l’Acte Uniforme portant procédures simplifiées de recouvrement et les voies d’exécution que le principe « pas de nullité sans grief » n’est pas de mise et l’on se retrouve plutôt face à une situation ou la nullité doit être prononcée dès que la formalité prescrite n’est pas respectée sans avoir égard à un quelconque grief qui pourrait être invoqué. Nous retrouvons ces nombreuses mentions légèrement différentes selon le type de saisie dans plusieurs articles à travers ledit Acte Uniforme. Il s’agit notamment des articles 8, 64, 67, 69, 77, 79, 82, 100, 109, 148, 157, 160, 223, 231, 232…

En matière de saisie immobilière, pour certains articles précis le principe « pas de nullité sans grief » trouve application. On peut à cet effet lire l’article 297 qui dispose : «Les délais prévus aux articles 259, 266, 268, 269, 270, 276, 281, 287, 288 alinéas 7 et 8 et 289 ci-dessus sont prescrits à peine de déchéance.
Les formalités prévues par ces textes et par les articles 254, 267 et 277 ci-dessus ne sont sanctionnées par la nullité que si l’irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux intérêts de celui qui l’invoque.
La nullité prononcée faute de désignation suffisante de l’un ou plusieurs des immeubles compris dans la saisie n’entraîne pas nécessairement la nullité de la poursuite en ce qui concerne les autres immeubles. »

En RDC, le code de procédure civile a consacré en son article 28 le principe « pas de nullité sans grief ». Cet article dispose : « Aucune irrégularité d’exploit ou d’acte de procédure n’entraine leur nullité que si elle nuit aux intérêts de la partie adverse ». Celui qui invoque une irrégularité doit prouver qu’elle lui porte préjudice et il revient au juge d’apprécier le vice et le grief. Cette situation a permis de décanter et de désengorger les juridictions face au dilatoire pouvant élire domicile au prétoire. Le juge Congolais face au cas de nullité prévu dans l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement de créances et des voies d’exécution devra se conformer à cet Acte Uniforme pour les cas qui lui seront soumis.

Au regard de l’article 297 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement de créances et des voies d’exécution, le principe « pas de nullité sans grief » aurait pu faire fortune en matière de saisie mobilière également. La sanction de certaines irrégularités devrait pouvoir être laissée à l’appréciation du juge au regard du préjudice qu’elle cause à la personne qui l’invoque. En cas d’une réforme de cet Acte Uniforme, pour plus d’efficacité, le législateur OHADA devrait en tenir compte. Des mentions telles que le caractère très apparent ou même la reproduction intégrale de certaines dispositions ne devraient pas faire l’objet de sanction automatique. En effet tout Homme moyen placé dans les mêmes conditions lirait et relirait tout acte de procédure porté à sa connaissance. Et s’il y a des dispositions légales citées il va se renseigner sur celles-ci. L’on ne doit pas oublier qu’il y a toujours cette possibilité de recourir aux services d’un avocat. Même dans ses conditions le souci de garantir l’information ou d’éviter que l’on prétexte une quelconque ignorance se trouve toujours rencontrée.

Ce formalisme strict est une forte contrainte à charge du créancier étant donné que les violations de la loi ne sont pas souvent dues à son fait. Cela accorde parfois un avantage au débiteur car il arrive souvent que toutes ses exigences d’ordre procédurales ne soient pas respectées. Cette situation qui est une aubaine pour le débiteur évolue au détriment du créancier et génère une lenteur dans la procédure tout en augmentant les difficultés pour celui-ci de rentrer dans ces droits. Il appartient au législateur OHADA de tenir compte de cette difficulté qui est un paradoxe pour alléger la procédure dans certains cas et admettre l’application du principe « pas de nullité sans grief ».

Toutes ses mentions doivent impérativement figurer dans l’acte « ….à peine de nullité ». Lesdites mentions sont notamment :

+ La copie de l’autorisation de la juridiction pour pratiquer une saisie ;
+ La copie du procès-verbal de saisie ;
+ La désignation de la juridiction devant laquelle seront portées les contestations;
+ L’élection de domicile dans le ressort territorial juridictionnel où s’effectue la saisie si le créancier n’y demeure pas ;
+La copie du titre exécutoire ;
+ Le décompte distinct des sommes à payer en principal, frais et intérêts échus, ainsi que l’indication du taux des intérêts ;
+ Le commandement de payer ;
+ L’indication, en caractères très apparents de certaines mentions ;
+ La reproduction de certains articles de l’Acte Uniforme ;…

A la suite des contestations notamment en matière de saisie conservatoire ou de saisie-attribution les Tribunaux de Commerce de la ville-province de KINSHASA ont dans plusieurs affaires tenu compte de ses exigences d’ordre procédurale pour déclarer les exploits nuls à la suite de l’inobservance des mentions à faire figurer dans les exploits et ont ordonner la mainlevée de ces saisies.

S’agissant des mentions à faire figurer en caractère apparent, cette exigence d’ordre procédurale ne peut être observée qu’après lecture des différents exploits.
Que doit-on entendre par apparent ? Selon le vocabulaire Juridique le mot apparent renvoie à des synonymes tel que manifeste, évident…Dans un deuxième sens donné au mot manifeste celui-ci signifie « En soi très apparent, patent, qui se révèle de lui-même et de façon très visible… ».

La lecture des exploits révèle que dans les différents Tribunal de Commerce de la ville de Kinshasa les mentions devant figurer en caractère apparents apparaissent en caractère gras sur l’exploit. On relève aussi que parfois ce caractère apparent se trouve aussi dilué du fait que d’autres mentions ne devant pas se retrouver en caractère apparent sont saisies en caractère gras. Dans d’autres exploits on constate des mentions qui apparaissent en manuscrit et d’autres saisies à l’ordinateur. Lesquels de ses mentions sans avoir vérifié la loi sont en caractère apparents ? Ces situations peuvent faire disparaitre dans certaines circonstances le caractère apparent et rendre l’acte nul au regard de cette exigence.

Les juges font attention à cette exigence. C’est ainsi que dans un cas d’espèce la juridiction présidentielle a dans son ordonnance déclaré l’exploit nul pour non-respect du caractère apparent : « …En outre l’article 160 du même texte prescrit en son point 2, qu’à peine de nullité, l’acte de dénonciation de la saisie-attribution contient, en caractères très apparents notamment l’indication que les contestations doivent être soulevées, à peine d’irrecevabilité, dans un délai d’un mois qui suit la date d’expiration du délai et la juridiction compétente.
Or à la lecture dudit exploit ne sont repris en caractères très apparents que la date du 8mars 2013, supposée être celle d’expiration et le Tribunal de Commerce de Kinshasa /Gombe considéré malheureusement comme juridiction compétente en lieu et place de la juridiction du président en application de l’article 49 du même acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution et non les autres mentions ;
Le non-respect des toutes ses formalités substantielles prescrites à peine de nullité ne peut avoir comme conséquences juridique que la nullité des PV des 31 janvier 2013 et 1er février 2013 et de l’acte de dénonciation de la dite saisie a la partie saisie de 7 mars 2013… ».

S’agissant de la mention relative à la juridiction compétente celle-ci a connu des difficultés d’application au début, les exigences formulées par la loi n’étant pas toujours respectées par les huissiers de justice au moment de la rédaction de l’acte.
Dans plusieurs cas, l’exploit a été déclaré nul au motif que l’huissier instrumentant n’a pas eu à désigner correctement la juridiction compétente à saisir en cas de contestation d’une mesure d’exécution. Souvent le Tribunal de Commerce était repris dans les exploits en lieu et place du président de la juridiction statuant en matière d’urgence.
Le Tribunal de Commerce de Kinshasa/Matete a ordonné la main levé de la saisie-vente à la suite de la nullité de l’exploit pour non respect de l’article 92 point 1°pour absence de commandement préalable mais aussi de l’article 100 point 1° de l’AUPSRVE pour défaut d’indication du domicile élu par la partie saisissante. (ord n°62 du 20/06/2013).
Bien que le juge Congolais soit strict dans l’application des articles consacrant la nullité, il y a lieu de relever que la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) a eu à prendre des positions tempérées en ce qui concerne l’exigence de certaines mentions . Dans l’Arrêt n°008/2002 du 21 mars 2002, la CCJA malgré l’erreur dans l’orthographe du nom du défendeur n’a pas retenu la nullité de l’exploit sollicité en vertu de l’article 157 de l’AUPSRVE au motif que malgré que cette erreur soit commise par l’huissier, le défendeur a accepté de recevoir et de signer l’exploit de signification de l’acte d’appel et de conclure au fond.

Une application différente constatée dans les Tribunaux de Commerce de Kinshasa se situe au niveau de la signature à apposer sur l’ordonnance en matière de contestation. Au niveau du Tribunal de Commerce de Kinshasa/Matete ces ordonnances sont signées uniquement par le Président de la juridiction qui a eu à connaître de la cause. Par contre au niveau du Tribunal de Commerce de Kinshasa/Gombe celles-ci sont signées par le Magistrat ayant siégé et le greffier dans la majorité des cas et dans quelques rares situations le magistrat délégué a eu à signer seul les ordonnances.
Ce sont des divergences de positions qui surgissent dans les juridictions et qui ne peuvent trouver solutions qu’au cours des plénières organisées au sein des juridictions. Des réunions entre juridictions permettraient également d’avoir une même position sur une question de droit donnée ou une pratique. La haute hiérarchie devrait favoriser ce genre de rencontre quel que soit la compétence de la juridiction.
L’idéal serait aussi que des mesures règlementaires ou administratives soient prises à ce sujet mais également pour la tenue des registres tels que les rubriques devant y figurer ainsi que bien d’autres actes.

V. Registre des procédures simplifiées de recouvrement

L’AUPSRVE dispose en son article 18 alinéa 1er « Il est tenu au greffe de chaque juridiction un registre, coté et paraphé par le président de celle-ci, et sur lequel sont inscrits les noms, prénoms, professions et domiciles des créanciers et débiteurs, la date de l’injonction de payer ou celle du refus de l’accorder, le montant et la cause de la dette, la date de la délivrance de l’expédition, la date de l’opposition si elle est formée, celle de la convocation des parties et de la décision rendue sur opposition. … »

Il se dégage que dans plusieurs juridictions de la ville province de KINSHASA il n’existe pas un registre spécial. Nous retrouvons plusieurs situations ou toutes les affaires en matière civiles et/ou commerciales sont enregistrées dans le même registre.
Au niveau de certains secrétariats il est enregistré toutes les ordonnances que peut prendre le chef de juridiction dans un registre nommé ordonnancier notamment :
Les ordonnances en débet ;
Les ordonnances d’injonction de payer ;
Les ordonnances abréviatives de délai…
Les procédures en opposition de ces ordonnances d’injonction de payer se trouvent enregistrées dans les registres ordinaires à savoir pour les Tribunaux de Commerce le registre des affaires commerciales et économiques(RCE) et les tribunaux de Grande Instance dans le registre nommé rôle civil(RC). Donc le prescrit de l’article 18 n’a pas été respecté.

Néanmoins il a été constaté qu’au Tribunal de Commerce de Kinshasa/Matete pour se conformer à l’article 18 précité, il existe un registre d’injonction de payer, de restituer et de délivrer (RIPRD). Celui-ci reprend les ordonnances d’injonction de payer, de restituer et de délivrer ainsi que les oppositions à ces ordonnances. Il est également intéressant de signaler qu’en plus d’autres registres dans cette juridiction, il existe un registre de référé et un registre de la juridiction présidentielle(RJP) qui comprend toutes les contestations soumises à cette juridiction.
Jusqu’au mois de juillet 2013 dans les deux Tribunaux de Commerce aucune demande de délivrance ou de restitution d’un bien meuble corporel déterminé n’a été enregistrée au greffe.

La formulation de l’article 18 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution est de lecture aisée. Il est donc de la responsabilité des chefs de juridiction mais aussi des responsables des greffes de veiller à l’application des dispositions prévues par la loi et de prévoir un registre spécial comprenant les différents éléments repris dans l’article précité.

VI. Application de l’article 12 dans la phase de l’opposition dans la procédure d’injonction de payer

Au regard, des différentes procédures engagées dans les tribunaux la phase de l’opposition est envisagée de manière différente.
La procédure de conciliation, qui est confidentielle, a pour objet de rechercher un accord amiable entre les parties et ainsi accélérer la solution du litige et éviter les charges financières d’un procès. Le législateur OHADA n’a pas fixé de quelle manière la procédure de conciliation devait se dérouler. Ainsi au Tribunal de Commerce de Kinshasa/Gombe avant que la composition désignée ne siège, le président de la chambre procède à la tentative de conciliation. Il siège en chambre du conseil. Parfois, il est demandé aux avocats d’aller obtenir une procuration spéciale de leurs clients afin de pouvoir valablement transiger ou encore les avocats sollicitent une remise à cette fin. A cet effet une remise est consentie et parfois la procédure s’étend en longueur.
Il ressort de la lecture d’une assignation à comparaitre en vertu de l’article 11 de l’AUPSRVE, qu’au Tribunal de Commerce de Kinshasa/Matete , il est signifié aux parties dans le même exploit de comparaitre par devant le Président du Tribunal pour une audience de conciliation conformément à l’article 12 du texte précité. Cette audience se déroulera en chambre du conseil.

Dans quelques rare cas la conciliation ayant réussi un Procès- verbal de conciliation a été dressé. Dans une affaire à la suite d’une ordonnance d’injonction de payer, pour une somme de 19.200$us, un procès-verbal de conciliation a été dressé et signé par le président et les parties en conflit en date du 04/06/2013. La lecture de ce Procès- verbal renseigne : « A l’issue de la tentative de conciliation passée, en date du 04/06/2013, entre monsieur JPK et monsieur MN assistés de leurs conseils…un compromis partiel a été trouvé entre parties. Le débiteur JPK reconnait devoir la somme de 6.700$ us (six mille sept cents dollars) et ce au regard des décharges établies en date du 19, 23 et 24 septembre 2009. En foi de quoi… ».

On constate que la somme reconnue par le débiteur JPK n’est pas celle de 19.200$us qui apparait dans l’ordonnance d’injonction de payer mais plutôt celle de 6.700$us reconnu après conciliation au regard des décharges invoquées. Le Procès- verbal ayant été signé par les parties sans émettre aucune réserve la conciliation est donc parfaite. Cela est confirmé par l’apposition de la formule exécutoire sur le Procès- verbal de conciliation et signification dudit procès-verbal en date du 28/06/13 à la requête du créancier MN.
En cas de désaccord le Tribunal de Commerce de Kinshasa/Matete a eu à établir plusieurs procès-verbaux de non conciliation. Le Tribunal de Commerce de Kinshasa/Gombe dans la cause inscrite sous le RCE 3045 a par PV de non conciliation en date du 05/06/2013 fait le constat de l’échec de la conciliation. Il sied de faire état d’une certaine doctrine qui soutient que si à l’audience de renvoi, la conciliation n’intervient pas, le juge doit constater par jugement avant dire droit, l’échec de la tentative de conciliation.
L’article 12 dispose : « La juridiction saisie sur opposition procède à une tentative de conciliation. Si celle-ci aboutit, le président dresse un procès-verbal de conciliation signé par les parties, dont une expédition est revêtue de la formule exécutoire. Si la tentative de conciliation échoue, la juridiction statue immédiatement sur la demande en recouvrement, même en l’absence du débiteur ayant formé opposition, par une décision qui aura les effets d’une décision contradictoire ».

Il ressort de cet article ci-dessus que le législateur OHADA n’a pas fait allusion au procès-verbal de non conciliation ni au jugement avant dire droit. Le fait de prendre une telle décision vicie-t-elle la procédure ? Nous relevons que l’audience de conciliation est une étape préalable avant l’examen de la cause en opposition. Que cette exigence de la loi est respectée même lorsque le président dresse un procès-verbal de non conciliation. En outre ledit Acte Uniforme n’a prévu aucune sanction quant à cette situation. La situation serait examinée autrement si un justiciable se plaignait que le temps mis pour la rédaction du procès-verbal de non conciliation ou du jugement avant dire droit lui aurait causé préjudice en allongeant la procédure et en favorisant l’insolvabilité du débiteur. Question de fait qui devra être examinée au cas par cas par les juridictions.
Une certaine tendance estime que cet automatisme de penser qu’à défaut de conciliation un P.V de non conciliation devrait être dressé doit disparaître à moins que le législateur OHADA au moment de la réforme n’opte pour cette solution. Pour d’autres bien que n’étant pas prévue l’établissement d’un Procès- verbal de non conciliation le fait de dresser un tel Procès-verbal est une pratique qui s’inscrit dans la logique de la loi et pratique judiciaire. Elle rallonge certes la procédure mais si l’on reste dans la logique du Procès- verbal de conciliation, il faudrait accepter la situation du Procès- verbal de non conciliation.

L’argument est tiré du droit du Travail ou il est prévu une procédure de conciliation en cas de litige individuel du travail entre le travailleur et l’employeur. A l’issue de celle-ci selon qu’il y a conciliation ou non l’inspecteur du travail va dresser un PV de conciliation ou de non conciliation ou encore établit un procès-verbal de carence valant constat de non-conciliation.
Dans un souci de célérité, étant donné que dans la majorité des cas il n’y a pas entente, la phase de conciliation pourrait être abandonnée étant donné qu’il est pratiquement fait recours à l’opposition et c’est devenu une étape qui sert parfois pour faire prospérer le dilatoire. Qu’en outre il y a possibilité pour les parties de se mettre d’accord à n’importe quel stade du procès et obtenir du tribunal un jugement d’expédient constatant leur accord. En cas de désaccord un jugement tranchant le litige interviendra à la fin du procès.
Cette hypothèse bien que reflétant la réalité sur terrain semble s’éloigner des premières préoccupations du législateur OHADA qui voulait d’une procédure de conciliation dans le but de favoriser un règlement amiable rapide. Malheureusement le recours à l’opposition de l’ordonnance d’injonction de payer est quasi automatique . En cas de réforme de l’AUPSRVE des débats devraient porter sur cette question. Un effort de sensibilisation auprès des acteurs judiciaires, sur la nécessité de cette étape pourrait peut-être améliorer la situation.
L’exigence de statuer immédiatement telle que prévue à l’article 12 sous examen est dans la pratique réalisée de façon diverse . Immédiatement signifie –t-il qu’à la première audience l’instruction doit avoir lieu et la cause doit être prise en délibéré. On constate dans la pratique que plusieurs remises sont accordées sans que la cause ne soit examinée ou que jugement intervienne.

Il serait indiqué au regard de l’article 12, en attendant la réforme, que les juridictions puissent suivre à la lettre les exigences de l’article précité. Il devrait également être compris que « statuer immédiatement » signifie commencer la procédure directement après l’échec de la conciliation. Le juge sera donc guidé par les éléments du dossier qui devront être examinés et traités avec célérité. Cela n’exclut donc pas les remises à accorder aux parties pour tel ou tel motifs ou devoir à accomplir. Dans cette situation le législateur OHADA devrait contenir la procédure d’opposition dans un délai précis. Même sans prévoir des sanctions en cas de non-respect du délai, l’obligation de respecter la loi et de l’appliquer qui pèse sur le juge l’obligerait à se conformer à ce délai sous peine de mesure disciplinaire . La pratique fera que la partie qui a formé l’opposition dès la première audience communique toutes ses pièces et moyens à son adversaire. Il serait également avantageux que l’appel soit limité dans le temps. Cela permettrait de rejoindre les premières préoccupations au moment de la création de l’OHADA de voir les procédures simplifiées de recouvrement être des procédures accélérées.

VII. Article 30 de l’AUPSRVE

Le législateur OHADA instaure le principe de l’immunité d’exécution des personnes morales de Droit public ou des entreprises publiques.
L’article 30 de l’AUPSRVE dispose : « L’exécution forcée et les mesures conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d’une immunité d’exécution.
Toutefois, les dettes certaines, liquides et exigibles des personnes morales de droit public ou des entreprises publiques, quelles qu’en soient la forme et la mission, donnent lieu à compensation avec les dettes également certaines, liquides et exigibles dont quiconque sera tenu envers elles, sous réserve de réciprocité… »
Cette immunité des personnes morales de Droit public ou des entreprises publiques malgré son tempérament de compensation des dettes pose problème surtout lorsque celles-ci agissent ou concluent des contrats dans le cadre d’une activité commerciale.
La solution serait celle qui est préconisée par la majorité des intervenants du monde des affaires de voir la portée de ce principe d’immunité d’exécution dont bénéficient les personnes morales de Droit public être réduit. Cette restriction concernerait uniquement les personnes morales de Droit Public agissant strictement dans le cadre d’une mission de service public .

Mais si ces dernières contractent avec un partenaire pour obtenir des fournitures de bureau par exemple cette solution posera également problème étant donné qu’il y aura également un fournisseur se trouvant en difficulté de recouvrer sa créance. Et si après compensation un solde persiste, quelle sera la solution à adopter ? Faudra-t-il attendre une solution à l’amiable dépendant du bon vouloir de l’établissement public ?
Dans un cas d’espèce, à la suite d’une ordonnance d’injonction de payer du président ai du tribunal de commerce de Kinshasa/Gombe, une saisie attribution avait été opérée sur les avoirs logés dans différentes banques du Programme National Multisectoriel de lutte contre le SIDA (PNLMS) qui est une institution publique de l’Etat chargée de la lutte contre le SIDA . Celui-ci va initier une action en contestation de cette saisie attribution. La décision qui interviendra fera application de l’article 30 précité pour ordonner la main levée de ladite saisie au motif que le PNMLS est une institution publique de l’Etat. (Référé 243)

La grande tendance à Kinshasa estime que les partenaires en affaire devraient bénéficier des mêmes avantages et être soumis aux mêmes règles. Cela permettrait de maintenir l’équilibre tant recherché pour les activités économiques et commerciales et obligerait ainsi chaque partie à un contrat à respecter ses engagements. L’assainissement du climat des affaires tant recherché dans le pays et dans la zone OHADA devrait également passer par cette solution.
Il est constaté paradoxalement à cet article 30 que des saisies continuent à être pratiquées sur les avoirs de ses Entreprises publiques transformées. L’Huissier de justice près le Tribunal de Commerce de Kinshasa/Gombe a eu à procéder à une saisie attribution des créances en date du 13 mai 2013 sur les sommes d’argent de la société commerciale des transports et des ports, une entreprise publique transformée .
Les Tribunaux de Commerce de Kinshasa font application de l’article 30 susmentionné et toute les fois qu’une saisie a été opérée sur les biens des Entreprises publiques transformées en sociétés commerciales, établissements publics et services publics ils ont rendu des décisions ordonnant la main levée desdites saisies.
En effet il a été décidé en ce sens à plusieurs reprises du fait que l’Etat Congolais est l’actionnaire unique et de ce fait ses avoirs ne peuvent faire l’objet d’une exécution forcée parce que bénéficiaire d’une immunité d’exécution.

Les actions en justice continuent à être initiées. Cela ne fait que ressortir la situation dans laquelle sont placés les créanciers. Une solution dans devient impérieuse.
En règle générale les contrats en droit privé sont signés sur une base égalitaire et sont basés sur le consentement. La position « dominante » des personnes morales de droit public ou des entreprises publiques au regard de l’article 30 crée un déséquilibre et une perturbation dans le monde des affaires. Certes ces dernières visent l’intérêt général dans les activités et missions qui sont les leurs. Mais doivent-elles pour cela être le maillon faible de l’activité économique en se « recouvrant » de l’article 30 de l’AUPSRVE toute les fois qu’elles devront faire face à leurs obligations ? La solution proposant la restriction de l’immunité d’exécution uniquement aux personnes morales de Droit Public agissant strictement dans le cadre d’une mission de service public serait une avancée. Elle devrait être renforcée par une procédure particulière devant aboutir au paiement de la créance et répondant à un certain délai et pourquoi ne pas envisager le cas échéant une levée de cette immunité. Une autre solution qui va dans le sens du dynamisme du Droit serait celle de voir les entreprises publiques par exemple renoncer à leur immunité d’exécution au moment de la signature du contrat. Cela aurait au-delà du bénéfice que l’on pourrait tirer sur le plan judiciaire celui de favoriser la Bonne Gouvernance dans la zone OHADA.

VIII. Article 111 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions de l’ordre judiciaire

L’article 111 de la loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions de l’ordre judiciaire dispose « Quelle que soit la valeur du litige, les présidents des tribunaux de paix, ou, à défaut, les présidents des tribunaux de grande instance, là où les tribunaux de paix ne sont pas installés, peuvent autoriser les saisies arrêts et les saisies conservatoires en matière civile ou commerciale ».
La lecture de cet article engendre au sein du monde judiciaire et du monde des affaires des interprétations et application différentes.
Bien que le thème développé ne concerne que la ville de Kinshasa, il est cependant utile de signaler que le Tribunal de Commerce de Lubumbashi en matière de saisie connait des applications différentes dépendant de la position du chef de juridiction. Le premier chef de juridiction a eu à procéder aux saisies tel que cela était prévu dans le titre III « Des voies d’exécution et de sûreté » du code de procédure civile datant du 07 mars 1960 partant des articles 105 à 143 tout en prenant en compte la compétence en matière commerciale et économique.

Le président l’ayant succédé au regard du même texte a estimé que les saisies devaient être opérées par les tribunaux de paix et pour toutes celles liées à la matière économique et commerciale la validation de la saisie devait se faire par devant le Tribunal de Commerce. Le troisième magistrat à présider cette juridiction va revenir à la première position et pratiquer les saisies. A la date de ce jour au regard de l’article 111 de la loi précitée le Tribunal de Commerce de Lubumbashi a délaissé la matière des saisies aux Tribunaux de paix du même ressort.

Le Tribunal de Commerce de Kinshasa/ Matete continue à procéder aux saisies. S’agissant du Tribunal de Commerce de Kinshasa / Gombe celui-ci estime que la compétence en ce qui concerne les matières commerciale et économique lui est dévolue de par la loi et continue aussi à procéder aux saisies. Qu’en outre au regard des règles édictées par l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, l’article 111 se trouve abrogé. Que c’est ainsi elle a eu à déclarer nul et de nul effet l’ordonnance de saisie conservatoire prise et tous les actes y afférents par le Tribunal de paix de Kinshasa/Gombe au motif que le juge de paix est incompétent en raison de la matière et a ainsi ordonné la main levée de la saisie .
Les tribunaux de paix, fort de cet article 111 procèdent aux saisies quelle que soit la matière.

A la suite de l’ordonnance n°0103/2013 rendue par le Tribunal de paix de Kinshasa/Matete en date du 10/07/2013 dans une matière commerciale (bail professionnel) des biens d’un commerçant ont été saisi. Le président a ordonné la saisie sur pied des articles 137 et 138 du code de Procédure civile. Pourtant, le titre III « Des voies d’exécution et de sûreté » du code de procédure civile datant du 07 mars 1960 partant des articles 105 à 143 comme dit plus haut a été abrogé par l’article 336 de l’AUPSRVE.

Cet article 111 pose problème au regard du Droit OHADA et de la compétence matérielle des Tribunaux de Commerce.
S’agissant du droit OHADA, l’article 10 du traité du 17/10/1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique tel que révisé à ce jour dispose que les Actes Uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les Etats parties nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure.

Cet article 10 consacre la primauté et l’effet direct des Actes Uniformes . La CCJA , dans son avis n°002/99/EP du 13 octobre 1999 sur demande de la République du Mali en date du 22 mai 1999, avait émis la réponse suivante :<