Contribution au diagnostic des difficultés d’application par les établissements financiers du nouvel acte uniforme sur les droits de suretés

Dix ans après son entrée en vigueur, l’acte uniforme vient de connaitre de profonds changements avec la consécration de nouvelles formes de garanties. Ce nouvel acte uniforme, (NAUPOS) adopté en Décembres 2010 fait déformais partie de notre droit positif depuis le 15 Mai 2011.

La présente intervention ne sera pas axée sur la revue de toutes les garanties prévues par le nouvel acte uniforme mais plutôt sur les quelques aspects qui peuvent constituer un obstacle à une optimisation de cette nouvelle réforme.

Ce choix se justifie par la nécessité de trouver en toute urgence des solutions aux problèmes que nous allons dérouler au cours de nos développements et qui découlent d une part de l’interprétation et de la compréhension de certaines dispositions de l’acte uniforme et d’autres part de la mise en œuvre par les institutions financières en particulier les banques de ces nouvelles formes de garanties.

I.Difficultés d’interprétation et d’application des dispositions relatives au transfert fiduciaire de sommes d’argent.

Le transfert fiduciaire de sommes d’argent est l’une des grandes innovations de ce nouvel acte uniforme. En effet, cette technique contractuelle, d’origine latine longtemps pratiquée par les pays anglo-saxons vient d’être consacrée par le législateur de l’OHADA à travers les dispositions 87 à 91 du NAUPOS. L ‘article 87 alinéa 1 le définit comme étant « la convention par laquelle un constituant cède des fonds en garantie de l’exécution d’une obligation. ». Les conditions de réalisation de cette garanties sont prévues par l’art 91 alinéa 2 qui dispose qu’ « en cas de défaillance et huit jours après que le constituant en ait été dûment averti, le créancier peut se faire remettre les fonds cédés dans la limite du montant des créances garanties demeurant impayées ».

En passant en revue toutes ces dispositions, nous nous sommes rendus compte que dorénavant, à défaut de recourir au nantissement de compte bancaire qui est également une innovation de l’acte uniforme (art 136 à 139 ), le dépôt à terme peut servir à constituer l’assiette d’un transfert fiduciaire de sommes d’argent . Cependant, leur application dans la pratique va sans doute de poser de sérieuses difficultés pour les banque .En effet, si pour le nantissement de compte bancaire la difficulté majeure se résume en termes de couts à faire supporter au client , le transfert fiduciaire risque de susciter peu d’intérêt pour les établissements financiers du fait de sa complexité dans sa formalisation par rapport à la réglementation et la pratique bancaire . Autrement dit les institutions financières seront confrontées aux difficultés d’interprétation et d’application des dispositions relatives au transfert fiduciaire de sommes d’argent.

En analysant de près les dispositions évoquées plus haut nous en avons déduit que le législateur de l’OHADA a dessiné les contours d’un rapport triangulaire : CLIENT /BANQUE / ETABLISSEMENT TENEUR DE COMPTE. L’on est même tenté de se demander si à travers cette réforme, le législateur de l’OHADA n’a pas voulu poser les jalons d’une consécration de l’Agent fiduciaire après celle de l’Agent de Sureté qui constitue la grande innovation de ce nouvel Acte Uniforme .En tout cas, trois expressions contenues dans ces nouvelles dispositions permettent de conforter notre position :

La première : art 87 alinéa 2 : « Ces fonds doivent être inscrits sur un compte bloqué ouvert au nom du créancier dans les livre d’un établissement de crédit habileté à les recevoir ».

La deuxième : art 89 : « le transfert fiduciaire devient opposable aux tiers à la date de sa notification l’établissement de crédit teneur de compte »

La troisième : article 91 alinéa 2 : « en cas de défaillance du débiteur et huit jours après le constituant en ait été dûment averti, le créancier peut se faire remettre les fonds cédés dans la limite du montant des créances garanties demeurant impayées ».

En d’autres termes trois idées majeures se dégagent respectivement de ces trois articles à savoir :

L’ouverture d’un compte au nom du créancier (non au nom du débiteur comme c’est le cas dans la pratique) dans un établissement de crédit habileté à recevoir les fonds objet de la garantie ;

La notification de la constitution de garantie à l’établissement teneur de compte ;

La remise des fonds au constituant en cas de défaillance du débiteur
Examinons successivement ces différentes idées et leur application dans la pratique.

D’abord sur l’expression l’établissement de crédit teneur de compte : A ce niveau deux hypothèses peuvent se dégager :

La première hypothèse : le créancier est en même temps l’établissement de crédit teneur de compte. D’emblée on peut présager d’une contradiction entre le plan comptable bancaire adopté par l’UMOA et ces nouvelles dispositions de l’acte uniforme. A titre illustratif, le PCB prévoit que les garanties reçues de la clientèle soient comptabilisées dans un compte rattaché au compte principal ouvert au nom du débiteur. Il s’agit simplement d’un compte auxiliaire au compte courant du client ouvert dans les livres du banquier créancier.

Or le nouvel acte uniforme précise que ces fonds doivent être logés dans un compte ouvert au nom du créancier banquier préteur. En cas de production d’intérêts, ces derniers sont portés au crédit du compte. Il est inutile de dire que les utilisateurs de cette réforme notamment les banques auront de sérieuses difficultés à comptabiliser dans leur livres un actif appartenant à leur clientèle et logé dans un compte ouvert en leur propre nom en leur qualité de créancier banquier préteur. Cette difficulté sera plus perceptible lorsqu’un créancier banquier préteur devra rémunérer les fonds logés dans son propre compte ouvert en son nom propre en couverture des engagements de sa clientèle.

A titre d’exemple le banquier préteur devra justifier sur le plan comptable la rémunération d’un DAT transféré en sa faveur sur un compte ouvert non pas au nom de son débiteur mais à son propre nom dans ses propres livres.

La deuxième hypothèse : l’établissement dépositaire des fonds est différent de celui de l’établissement prêteur. Si la mise en œuvre d’une telle hypothèse est théoriquement concevable en ce qu’elle présente l’avantage de définir clairement les droits et obligations de chacune des trois parties CLIENT /BANQUE / ETABLISSEMENT TENEUR DE COMPTE (contrairement à la première hypothèse), en revanche elle est difficilement acceptable dans la pratique. En effet, il est difficilement concevable pour une banque de confier la gestion des fonds garantissant les engagements de son propre débiteur. En effet, la recherche effrénée de ressources et la rude concurrence que se livrent entre les banques sont autant de facteurs pouvant limiter l’optimisation de cette réforme.

Nous devinons déjà la réponse des initiateurs de cette réforme qui se résume à cette boutade « lex dura lex « ou « la loi est dure mais c’est la loi et qu’en conséquence il faut s’adapter au texte. Mais on oublie trop souvent qu’une loi qui ne tient pas compte des réalités sociologiques de ses utilisateurs ou de sa population d’une manière générale finit par être rangée dans les tiroirs des lois qui naissent et qui disparaissent le même jour du fait de leur non application.
La seconde expression qui nous fait croire à un rapport à l’externalisation de la garantie donc à cette seconde hypothèse ci-dessus évoquée est l’utilisation de l’expression « notification » dans les dispositions de l’article 89. En effet cet article dispose que « le transfert fiduciaire de sommes d’argent devient opposable aux tiers à la date de sa notification à l’établissement teneur de compte ». Mais que signifie le terme notification ? Si nous nous référons à la définition retenue dans le dictionnaire du vocabulaire juridique édité sous la direction du Professeur REMY CABRILLAC, cette notion signifie : « opération par laquelle un acte judicaire ou extrajudiciaire est portée à la connaissance de son destinataire. » En toute logique la notification fait intervenir deux parties à savoir l’expéditeur et le destinataire. Et c’est le cas lorsque le banquier prêteur est différent du banquier teneur de compte.

En revanche, il est difficile d’admettre que l’expéditeur soit en même temps le destinataire de la notification ou plus précisément que le banquier préteur, étant en même temps le banquier dépositaire des fonds, se notifie à lui-même la prise de la garantie. (L’exemple le plus rarissime est à trouver dans l’hypothèse où le créancier fait une saisie conservatoire ou attribution de créance entre ses propres mains). Ce qui ne nous semble pas être l’esprit du texte si nous poussons la réflexion sur les dispositions de l’art 91 alinéa 2 relatives aux conditions de réalisation de la garantie en cas de défaillance du débiteur.

En effet, cet article précise « qu’en cas de défaillance du débiteur et huit jours après que le constituant en ait été dûment averti, le créancier peut se faire remettre les fonds cédés dans la limite du montant des créances garanties demeurant impayées ». Alors de deux choses l’une : soit la remise des fonds est faite par un établissement de crédit autre que le banquier prêteur dans ce cas la thèse de l’existence d’un rapport triangulaire est bien confortée ; soit la remise des fonds est faite par la banque elle-même qui est à la fois banque prêteur et banque dépositaire des fonds.

En définitive, à notre humble avis, même, si le législateur n’a pas voulu expressément consacrer une autre innovation à côté de celle de l’Agent de sûreté (innovation dans le nouvel acte uniforme), il en a néanmoins posé les jalons de l’institutionnalisation de l’agent de fiducie. Cette forme de gestion externe de garanties reçues de la clientèle portant sur des sommes d’argent est très connue de la plupart des systèmes juridiques anglo – saxon. L’utilisation de certaines expressions renvoyant au rapport triangulaire décrit pus haut nous conforte dans notre position. D’ailleurs, le choix de l’intitulé de la garantie (transfert de fiduciaire de sommes d’argent) fait le législateur de n’est pas fortuit.

Autres aspects limitatifs de la réforme : le fait de soumettre la presque totalité de toutes les garanties portant sur les meubles corporels et incorporels au régime de l’inscription au RCCM.

II.SYSTEMATISATION DE L’INSCRIPTION DES GARANTIES

A l’exception du nantissement de compte de titres financiers et le gage avec dépossession, toutes les autres garanties prévues par le nouvel acte uniforme, doivent faire l’objet d’une inscription au RCCM. A défaut de l’accomplissement par les créanciers d’une telle formalité, ces derniers ne peuvent se prévaloir leur privilèges vis-à-vis des tiers.
Le choix fait par le législateur de soustraire le gage avec dépossession au régime de l’inscription au RCCM est parfaitement compréhensible car le bien n’est pas entre les mains du débiteur mais entre les mains du créancier ou d’un tiers convenu entre les parties.

En revanche, concernant le nantissement du compte de titres financiers, nous ignorons les raisons qui sont avancées par le législateur de l’OHADA pour justifier une telle exception ? Est – elle due au fait que la prise de cette garantie fait appel également au droit boursier dont les dispositions ne sont pas forcément maîtrisées par les utilisateurs de cette réforme? En tout cas, sans risque de se tromper il ya eu deux poids deux mesures sur cette position du législateur. Certainement, des explications seront apportées sur cette question.
En attendant, il convient d’énoncer que les aspects limitatifs de cette réforme peuvent être surtout appréhendés à d’autres niveaux différents de cette systématisation à l’inscription des garanties au RCCM. Il s’agit entre autres :

Du fonctionnement et de la gestion des greffes dans l’espace OHADA. Le problème majeur auquel sont confrontés les greffes de l’espace OHADA est leur informatisation. A ce sujet, il ne faut point se faire d’illusion, la réussite de cette réforme passe nécessairement par cette informatisation et une bonne sensibilisation des utilisateurs de ces textes.

De même, les différents Etats membres de l’OHADA gagneraient à revoir les coûts parfois jugés trop exorbitants que supportent les clients des établissements de crédit. En effet, à titre d’exemple, un client qui accepte de consentir en faveur de sa banque une sûreté sur son dépôt à terme en couverture de ses engagements supporte un pourcentage calculé suivant le montant de la garantie ; ce qui constituera à coup sûr une situation très embarrassante pour les banques qui doivent recourir à cette forme de garantie en convainquant leurs clients leur obligation de supporter ces nouveaux frais. Autrement dit, le recours au nantissement de compte bancaire suivant les dispositions de l’article 136 et suivant du NAUPOS passe nécessairement par l’inscription de cette garantie sous peine d’être inopposable aux tiers.

A cela s’ajoutent des réalités sociologiques que les acteurs de cette réforme ont malheureusement ignoré à travers cette volonté de soumettre, par exemple, la garantie sur le dépôt à terme à l’inscription au RCCM à travers sa notification au fichier national mais surtout régional .Effet, l’inscription de cette garantie au RCCM a également pour conséquence à travers la notification faite par le greffier suivant les dispositions de l’article 52, au fichier national et partant du fichier régional tenu auprès de la Cour Commune de justice et d’arbitrage à Abidjan, une forme de publicité sur la consistance et le titulaire de ce dépôt à terme .

Or, les populations africaines de manière générale rechignent souvent à révéler la consistance de leur patrimoine surtout lorsque il s’agit des questions qui tournent autour des sommes d’argent qu’elles confient à leurs banque même si l’origine est tout à fait licite. Cette attitude de ces populations est la consécration d’un slogan très ancien qui dit : « pour vivre heureux, il faut vivre caché » ou alors » l’argent ne veut pas de bruit » même si les institutions financières ne doivent pas tomber dans ce type de piège qui peut souvent servir de moyens pour certains de leurs clients à blanchir leurs avoirs dans leurs livres.

Cela dit, nous avons également noté que le législateur de l’OHADA à travers ces innovations vient d’alourdir malheureusement le lourd fardeau que doivent supporter les greffes avec la consécration de l’obligation de notification de l’inscription ou du refus d’inscription au débiteur ou au constituant de la garantie. En effet, l’art 54 du NAUPOS dispose que « l’inscription ou le refus d’inscription est également notifié par le greffe ou par l’organe compétent dans l’Etat Partie, au débiteur ou au constituant de la sûreté s’il n’est pas le débiteur. Cette inscription ou ce refus d’inscription peut, dans un délai de huit jours à compter de sa notification , faire l’objet d’un recours du débiteur ou du constituant selon le cas, devant la juridiction compétente, ou devant l’autorité compétente dans l’Etat partie, statuant à bref délai »
En respectant une telle formalité imposée au greffe avec toutes les difficultés liées à l’insuffisance de moyens à laquelle est confrontée cette institution, force est d’admettre que cela va entrainer un impact très négatif sur la qualité de relation entre les institutions financières et leur clientèle surtout lorsque l’achèvement de toutes ces formalités est une condition suspensive à la mise en place du financement.
Dans le même registre des innovations, le législateur a supprimé les formalités d’enregistrement des contrats constitutifs de sûretés mobilières. De même, la production de contrat enregistré ne doit plus être exigée par le greffier qui ne doit désormais se contenter que du bordereau d’inscription. Cependant, cette nouvelle mesure se heurtera dans la pratique à la réticence parfois même injustifiée de certaines administrations étatiques notamment celles fiscales pour la raison simple que les formalités d’enregistrement des contrats sont l’une des nombreuses niches de recettes.

III – Les MODALITES DE REALISATION DES GARANTIES HYPOTHECAIRES

En dehors de la procédure de saisie immobilière déjà prévue l’ancien texte, le législateur de l’OHADA vient de consacrer pour les créanciers hypothécaires à travers les articles 198 à 200 du NAUPOS deux autres voies de recouvrement de leur créance à savoir la demande d’attribution judiciaire de l’immeuble et l’insertion de pacte commissoire dans les actes constitutifs de garantie.

En effet, La demande d’attribution judiciaire de l’immeuble, objet de la garantie est désormais reconnue au créancier hypothécaire à condition qu’elle ne soit la résidence principale du Constituant. Autrement dit, les créanciers ne peuvent solliciter l’attribution judiciaire que pour les résidences secondaires du ou des constituants. Cependant, en l’absence de critères définis par la loi, il n’est toujours pas facile dans la pratique d’identifier la résidence secondaire surtout lorsque l’ on ‘ est en face d’un constituant ou d’un débiteur de mauvaise foi. C’est le cas par exemple d’une personne qui a plusieurs résidences dans les quelles vivent ses propres épouses et ses enfants. C’est le cas également lorsque le seul immeuble que détient le constituant n’est pas occupé par ce dernier mais fait l’objet d’un bail à usage d’habitation.

Sur le même registre nous estimons que bien au contraire qu’il serait plus logique et plus équitable de ne pas exclure la résidence principale de l’attribution judiciaire si toutefois on améliore les conditions de forme de sa réalisation pour préserver davantage les intérêts du débiteur. En effet, le fait que le débiteur soit conscient du risque de voir perdre son bien par cette voie beaucoup plus simplifiée mais tout de même acceptée par elle même , l’inciterait sans doute à davantage à respecter ses engagements et par la même occasion à encourager les banques à faciliter l’accès au crédit. Au demeurant, ce remboursement opéré par cette voie ne peut en aucun constituer un avantage pour la banque car l’on ne peut ignorer que les ressources immobilisées pendant tout le temps que va durer une procédure de recouvrement ne sont jamais compensées ni par le décompte des intérêts de droit encore moins par une plus value de cession. N’a-t-on pas coutume de dire que la garantie est un accessoire au remboursement du crédit ; le banquier aura forcément échoué dans sa politique d’appréciation du risque sur le client si le remboursement se fait par la garantie et non par l’activité de ce dernier. En d’autres termes, en se faisant rembourser soit par la banque a pris le risque de parier sur un client en mettant à sa disposition des fonds provenant de tiers avec lesquels il n’est établi qu’une relation de confiance. Cette situation fort préjudiciable pour l’équilibre des fonds et la rentabilité de la banque se caractérise souvent par une dotation aux provisions q’ un Directeur Général qualifie de prime octroyée au mauvais payeur. L’expérience douloureuse de la crise des banques dans l’espace UMOA dans les années 80 ainsi que le volume impressionnant des portefeuilles douteux et litigieux des banques notées à ce jour sont autant de facteurs qui nous autorisent à penser que la banque ne doit pas prendre plus de risque que son client.

Concernant le pacte commissoire, il faut d’emblée noter qu’il constitue également une des innovations majeures de cette réforme mais dont l’application soulèvera sans doute de difficultés pour les banques.
Mais que signifie pacte commissoire ?

Selon le lexique juridique élaboré sous la direction du Professeur Rémy Cabrillac, il est considéré comme étant une clause qui confère au créancier, titulaire d’une sûreté la faculté de s’attribuer par avance de plein droit, la propriété d’un bien de son débiteur en cas de non paiement à l’échéance.

Cette innovation traduit la volonté du législateur d’aider les institutions financières à contourner les difficultés liées à la longue durée des procédures de saisies immobilières ainsi que leur complexité et leur incertitude. La possibilité d’insérer un pacte commissoire dans les actes constitutifs de garantie portant sur un bien immobilier est désormais reconnue par les nouveaux testes de l’OHADA.

Cette possibilité est cependant assortie de dérogations et de conditions qui peuvent à notre humble avis susciter peu d’intérêt pour les établissements financiers à recourir à cette forme alternative de remboursement de leur crédit. En effet, le législateur précise bien que le pacte commissoire n’est admis que si :

Le constituant est une personne physique ou morale immatriculée au RCCM.

L’immeuble n’est pas à usage d’habitation.

C’est ainsi que le pacte commissoire n’est nous avons relevé que la résidence principale est exclue de l’objet du pacte commissoire. Autrement dit les résidences à usage d’habitation ne peuvent faire sont d’office exclue principale ou seule la résidence secondaire peut faire l’objet d’un pacte commissoire dans les actes constitutifs de garantie.

Qu’à cela ne tienne, malgré cette initiative du législateur de l’OHADA, nous avons également noté quelques difficultés que peuvent rencontrer les institutions financières et qui sont de nature à les décourager à recourir à cette forme de réalisation de garantie hypothécaire. Nous avons entre autres :

La désignation de l’expert par voie judiciaire au moment de la réalisation du pacte commissoire portant sur un immeuble appartenant au débiteur ou au constituant prévue par l’article 200 du NAUPOS. Cette disposition risque d’enlever tout intérêt que peur avoir tout créancier à recourir à cette forme remboursement de sa créance d’autant plus qu’il doit faire face non seulement au contentieux de recouvrement mais surtout au contentieux lié à la valeur de sa garantie. De même l’obligation faite au créancier de rétrocéder ou de consigner la somme excédant le montant les engagements de son débiteur n’est pas de nature à motiver les institutions financières. En effet, les comptables diront que l’impact que peut avoir le remboursement en trésorerie et celui en nature (adjudication d’un immeuble par exemple) n’est pas le même dans une compte d’exploitation d’une institution surtout lorsque celle –ci s’oblige
Une autre difficulté peut également surgir lorsqu’ il s’agit de déterminer la date de cette restitution tel que exigé par l’article 200 du NAUPOS. En effet, si sur le plan juridique ce problème peut être facilement réglé avec comme point de départ la mutation au nom du créancier, il reste que sur le plan comptable, la solution est assez difficile à trouver et même à justifier. En effet, la gestion comptable d’un remboursement en sommes d’argent est très différent de celui en nature .Cela est d’autant plus embarrassant pour le banquier lorsqu’ il doit effectuer entre les mains du constituant ou de créanciers un reversement pour un surplus de remboursement effectué par son client alors que le bien n’est pas encore ou risque de ne jamais être revendu (crise économique et baisse du pouvoir d’achat des populations , réalités sociologiques sur les biens saisi et appartenant à autrui etc …..) A cela s’ajoutent pour le banquier d’autres charges induites par la gestion de ces immeubles acquis par voie de réalisation qui peuvent constituer une limite au recours du pacte commissoire.
En définitive nous retiendrons que le législateur de l’OHADA a voulu à travers cette réforme mettre à la disposition des établissements de crédit une nouvelle gamme de sûretés pouvant leur permettre de se prémunir contre le risque de défaillance de leur clientèle.

Cette innovation se traduira dans la pratique notamment :

– par une technique de gestions de sûretés, avec la consécration de l’Agent de sûretés ;

– par une exigence de publicité pour renforcer la sécurité des tiers avec la quasi soumission de toutes les sûretés mobilières aux formalités d’inscription au RCCM.

– par l’admission du pacte commissoire comme mode alternatif de réalisation de garantie portant sur les immeubles et les meubles.

Cependant, malgré ce mérite qui doit être quand même reconnu aux initiateurs, force est de reconnaître au vu des aspects que nous avons jugés limitatifs et que nous avons recensés au cours de nos développements, que l’application de cette réforme ne peut être optimisée sans que des efforts supplémentaires ne soient faits par les Etats membres. A ce titre nous pouvons en citer quelque uns à savoir :

Doter les services de l’administration de la justice mais surtout des greffes de moyens humains et logistiques pour une bonne prise en charge des toutes les tâches qui leurs sont dévolues dans le cadre de cette réforme. De même cette dotation doit être accompagnée d’une bonne politique de formation et de sensibilisation de tous les utilisateurs de ce nouvel acte uniforme. D‘ailleurs sur ce point précis nous tenons à saluer la belle initiative des bailleurs de fonds tels que la banque mondiale qui a commencé à organisé des sessions de formations à l’intention des personnes cibles de cette réforme. C’est le cas du séminaire organisé récemment à BAMAKO qui a vu la participation de juristes de banques de certains pays de la sous région dont le Sénégal).

Veiller à une bonne application de ces nouveaux textes qui vont certainement entrer en contradiction avec certaines dispositions nationales) notamment le respect par les administrations fiscales de la suppression des droits d’enregistrement sur les contrats de garantie.
Harmoniser ces nouveaux textes avec les dispositions de l’UMOA qui régissent l’activité bancaire. D’ailleurs, nous sommes persuadés qu’il s’agit de l’équation la plus délicate à résoudre pour les établissements de crédit. L ‘interprétation et l’application des dispositions sur le transfert de fiduciaire de sommes d’argent en est une parfaite illustration. A ce sujet, l’intervention de la Cour Commune de Justice d’Arbitrage sera nécessaire pour préciser le sens de ces dispositions.
Telles sont les quelques mesures urgentes à prendre pour une bonne compréhension et partant une bonne application de cette réforme qui pourra nourrir les ambitions des initiateur de ce texte et justifier l’argumentaire de Monsieur Yondo BLACK expert à la Banque Mondiale, selon lequel « un pays qui n’a pas de régime efficace et effectif sur les opérations garanties risque de se priver de précieux avantages économiques »