Monsieur le Directeur et le Secrétaire générale de l’IDEF,
Monsieur le Président de l’Université de Montréal,
Mesdames et Messieurs les Membres de l’Idef,
Chers Amis,
C’est avec un réel plaisir que je prends la parole aujourd’hui devant vous. Avec plaisir et aussi avec fierté.
Je tiens, avant tout, à exprimer ma joie d’être aujourd’hui parmi vous, dans cette prestigieuse université qu’est la Faculté de Droit de Montréal.
Alors, oui, je suis fier de me présenter devant cette grande Assemblée, réunissant, à la place qui leur revient de droit, qui symbolisent notre engagement à tous.
En effet, c’est grâce à l’amiable invitation de mon cher Professeur Mercadal que je me trouve ici pour trouver la place du système juridique de l’Iran parmi les grandes familles juridiques contemporaines .
J’ai pensé que ce sujet serait susceptible de vous intéresser pour au moins deux raisons essentielles :
En premier lieu, l’effondrement du monde bipolaire à la charnière des années 1980-1990 a accéléré le processus de mondialisation de l’information, de l’économie, de la culture et bien évidemment du droit. La mondialisation du droit s’effectue en particulier dans le sillage de la globalisation de l’économie et des concepts relevant des droits de l’homme. C’est ainsi que l’idée d’un droit commun mondial s’est fait jour et s’est actualisé. L’avènement d’un tel droit doit se faire suivant la voie de l’harmonisation et non pas celle de l’unification, car l’harmonisation porte en elle-même l’idée du pluralisme qui, tout en respectant les spécificités des différents systèmes juridiques, exige cependant un accord commun autour de certaines valeurs devenues universelles.
En effet, le pluralisme porte en lui la chance d’échapper à une mondialisation surtout marquée par les stratégies de pouvoir, en somme d’échapper à cette monarchie universelle dont Kant, lorsqu’il rêvait de paix perpétuelle entre les nations, disait qu’elle pourrait conduire au despotisme le plus effroyable.
Ainsi, cet idée, nous semble-t-il, est de favoriser à terme l’avènement d’un droit commun pluraliste, mais ordonné autour de grands principes directeurs internationalement acceptés, afin d’éviter précisément qu’un modèle impérialiste ou une globalisation hégémonique du droit puisse se profiler à l’horizon.
C’est dans cet esprit, je pense, que l’IDEF avait l’idée originale de réunir, au début de l’année 1964, des juristes appartenant à différentes cultures juridiques, aussi bien européennes qu’américaines, asiatiques et africaines. Il s’agit alors de parvenir à dégager des principes directeurs internationaux de droit des affaires par le biais du droit comparé et du droit international.
En second lieu, l’Iran , un pays dont on a parlé et continue de parler ces derniers temps, à la fois dans la presse et dans les milieux universitaires, a connu en 1979 une révolution de nature essentiellement religieuse donnant naissance à un régime politique particulier dite la République Islamique, de tendance chiite.
Cependant, L’Iran est un pays à double visage, à la fois traditionnel et moderne. Comme vous le savez peut-être le droit moderne en Iran est né à la suite de l’adoption de la première Constitution en 1906. Le législateur iranien s’est tourné vers le droit français dont les codes napoléoniens étaient alors universellement connus et imités au moyen orient .
C’est ainsi que l’œuvre de la codification aussi bien pénale que civile en Iran s’est déroulée dans le sillage du code pénal de 1810, du code d’instruction criminelle de 1808 et du code civil de 1804 français. Plus tard, le code de commerce français a servi également de modèle pour l’adoption du premier code de commerce iranien.
En effet, le Code de commerce iranien de 1925, toujours en vigueur, a été largement basé sur le code de commerce de 1807 français. Le premier code de commerce iranien comprend seizelivres qui se décomposent chacun en titres particuliers. Ce code a été progressivement vidé de son contenu et ne contient plus, en son état actuel, que 600 articles. La majeure partie de la législation commerciale est ainsi disséminée dans une multitude de textes épars. C’est la raison pour laquelle, un projet de code de commerce est depuis quelques années à l’étude, projet auquel je contribue. Dans ce nouveau projet, les rédacteurs ont pris en compte des apports des droits comparés et les engagements internationaux de l’Iran.
On voit donc que le droit iranien a des liens historiques avec le système de droit civiliste. Aujourd’hui même le droit iranien bien que islamisé depuis 1980, suit de près l’évolution du droit comparé et notamment celle du droit français.
Toutefois, l’adhésion de l’Iran à des conventions et organisations internationales et les relations commerciales qu’il développe avec la communauté internationale, ont fait entrer dans le droit positif d’aujourd’hui certaines notions du système common law, telles que les valeurs mobilières, le commerce électronique, la concurrence et la protection de l’environnement qui ont été intégrées dans le droit iranien.
Pour prendre un exemple, la République islamique s’est récemment dotée d’une loi sur l’arbitrage commercial international . Elle complète ainsi le cadre juridique iranien en matière d’arbitrage qui était jusque-là régi par le Code procédure civil iranien de 1939 (« CPC »). Cette nouvelle loi a pour but de faciliter la conduite de procédures arbitrales internationales en Iran en prévoyant un mécanisme fiable de règlement de litiges, notamment dans le contexte de relations commerciales croissantes avec les pays de la région, et, plus particulièrement, avec les nouveaux pays indépendants d’Asie centrale. Plus généralement, cette loi devrait permettre de gagner la confiance des investisseurs étrangers et des partenaires commerciaux de l’Iran .
Ainsi, la famille de common law occupe une place de plus en plus importante en droit Iranien. On a entre le doit anglais et le droit iranien des points communs évidents : de plus en plus de droit écrit mais les fondamentaux de la matière restent jurisprudentiels.
Vous avez pu donc constater que le droit iranien a toujours été ouvert aux apports de droit comparé et de droit international. Et a toujours eu une relation active avec les droits étrangers. Ceci étant dit, le droit iranien est quand-même un droit particulier dans la mesure où il est construit et modifié dans le cadre du droit musulman. En effet, suivant l’article 4 de la Constitution iranienne toutes les lois et tous les règlements doivent être fondés sur les grands principes de droit musulman. Or, en matière économique et commercial, le droit musulman est ouvert et riche. Sensible à l’évolution du droit des affaires d’aujourd’hui.
C’est donc dans ce cadre que le système juridique iranien peut nouer de bonnes relations avec les juristes distinguées, membre de l’Idef. C’est aussi avec cette pensée et dans cette optique que j’assiste à ce congrès.
Je tiens à rappeler que vue le temps qui m’est imparti, j’ai été bref dans mon exposé. Mais vous trouverez, si vous le voulez bien, le détail de mes propos dans mon article qui sera publié dans les actes de colloque.
Je vous remercie de votre attention, et je suis sûr qu’on aura à cœur de suivre la voie que vous avez tracée et ensemble, nous continuerons de faire encore progresser les programmes de l’Idef, car la même passion nous anime.